Voici sous vos yeux mes derniers écrits et cris. Je vous laisse les parcourir. A vous de juger de la nature du libellé, je n'ai pas pu la déterminer.
Bonne lecture...
Homonymie aggravée
L’invité du Dr Robert Expartam,
édulco-analysologue à la revue « Par ici »
L’entretien,
- Tout d’abord bonjour, et merci d’avoir
accepté d’être parmi nous aujourd’hui.
Pouvez-vous vous présenter à nos
lecteurs ?
- Oui, je le peux, dit l’invité,
anatomiquement tout en rondeur.
- Mais, plus précisément.
- Heu, je suis donc un adjectif
qualificatif selon le dictionnaire « Le petit Vous » et un adjectif
qualificatif selon l’Encyclopédie « Dis moi tout », vous saisissez la
nuance.
- Oui d’accord, mais vous êtes nombreux
dans votre cas, cela n’éclaire pas beaucoup nos chers lecteurs.
- Afin de préciser ma situation, je me
trouve entre « gaguesque », je ne plaisante pas, et aux antipodes
« gaïac ». Je vois d’ici les petits malins qui vont se jeter sur leur
« Dis moi tout », les voilà bien avancés.
- Avez-vous des consoeurs ?
- Oui, bien-sûr, elles ont toutes un
« e ». Elles ont ce petit prolongement que nous n’avons pas au genre
masculin, il faut bien nous distinguer.
- Est-ce que cela vous dérange ?
- De quoi ?
- De ne pas avoir ce petit
prolongement ?
- Votre question est bizarre, avoir un
« e » ou pas me paraît naturel, c’est ainsi fait.
- Venons-en au sujet de cette interview.
Vous dites être banni, qu’en est-il ?
- C’est exactement ce qui me chagrine
actuellement et va à l’encontre de ma vraie nature.
- Quelle est-elle habituellement ?
- Plutôt enjouée.
- C’est complètement paradoxal !
- Je ne vous le fais pas dire.
- En fait, de quoi êtes-vous banni ?
- Et bien, du vocabulaire français.
- A ce point ?
- Tout à fait.
- Vous exagérez, vous ne pouvez en sortir
tout seul, il faut l’intervention de la toute puissante Académie pour cela.
- Absolument pas, l’usage suffit et fait
de moi une victime.
- Mais de quoi donc ?
- D’homonymie tout simplement. Et je
dirais même mieux, d’homonymie aggravée.
- Expliquez-nous !
- J’ai quatre homonymes répertoriés et
l’un d’entre eux me harcèle.
- Victime de harcèlement donc ?
- C’est effectivement le cas.
- Dites-moi, mais cela peut aller très
loin tout ça, dit le docteur sur un ton jubilatoire.
- J’en doute fort.
- Pouvez-vous nous dévoiler l’identité de
ce personnage néfaste ?
- Je ne sais pas si je le dois, j’ai
peur.
- Peur des représailles peut-être ?
- Oui, d’aller trop loin et d’être
assailli de démêlées judiciaires. Cependant, son attitude envers moi demeure
inqualifiable.
- Nous sommes entre nous, vous ne risquez
absolument rien. Cela ne sortira pas du cadre du lectorat.
- Vous le pensez sincèrement, vous me le
promettez ?
- Oui, oui vous pouvez nous faire
confiance ; le docteur opina d’un regard protecteur mais irrésistiblement
narquois.
- Dans ce cas, voici une petite histoire
vécue, venant illustrer mon propos.
Par une belle journée ensoleillée, temps
que j’affectionne, je me promenais dans une phrase, accompagné d’un nom commun,
pas triste par nature, plutôt joyeux luron.
Soudain, nous rencontrons un nom propre
de ma connaissance et je voulus, tout en le saluant, le qualifier. Mal m’en a
prit. Ce dernier de me dire sur un ton de reproche : « Oh non, pas
moi, je ne te permets pas ! ». Je venais visiblement de le qualifier
de quelque chose de honteux sous le poids d’une société toute pétrie de
préjugés moraux.
Faisant immédiatement la relation avec
mon homonyme, usurpateur d’identité, je me suis alors confondu en plates
excuses, rouge de confusion.
Il faut dire qu’en plus ce dernier était
l’objet de nombreuses polémiques souvent d’origines politico-journalistiques,
l’un n’allant pas sans l’autre ; mariage, genre, nudité…servies en pâture
à heures de grande écoute.
Depuis ce jour, je suis triste car je me
sens exclu, tout au moins de l’oralité. Il me reste l’écriture, mais où
j’apparais tout de même désuet. Disons que je survis grâce à la
« Littérature », ce grand mécène ayant encore quelques adeptes. Pourtant,
sous cette forme, il n’y a point d’ambiguïté ; la voyelle qui termine mon
adjectif étant différente de cet autre,
cet homonyme.
Malgré tout, je reste sombre, je suis
devenu mon contraire, dénaturé. C’est dans l’alcool et l’ivresse que je peux,
parfois, redevenir moi-même. Quel avenir !
- Vous ne nous avez toujours pas dit qui
est cet imposteur. Nos lecteurs doivent s’impatienter – le docteur aussi.
- Je ne vais pas les faire attendre plus
longtemps…il s’agit de « Gay ».
Et vous, vous êtes ?
« Gai », compagnon d’infortune
de « Pagaie ».
- Maintenant nous comprenons tout. Mais
je ne suis pas sûr que nous puissions faire quelque chose pour vous, mise à
part compatir. La situation de votre « homo comme ils disent »
n’est guère plus enviable. Telle est mon analyse.
- Je vous remercie pour vos conclusions
et votre invitation. Cela m’a fait du bien d’en parler avec vous.
- C’est moi qui vous remercie, je vous
dis au revoir et soyez courageux comme un pinson!
- ?...Ah oui ! J’ai compris.
- Je donne rendez-vous à nos lecteurs
pour une prochaine analyse du Dr Robert Expartam.
A bientôt.
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