Une petite deuxième dans la série "inspiration Hopper", pour le week-end... ou les vacances.
Je vous laisse la lire avec avidité...
– Paméla, dépêchez-vous de me faire
passer le dossier de M. Fox, je ne souhaite pas dormir ici !
– Je ne le trouve pas, il n’est pas rangé
dans les dossiers dont le nom commence par la lettre F.
Paméla venait de quitter son bureau de
secrétaire où trônait sa machine à écrire, une Rémington toute neuve et
rutilante que son patron venait de lui offrir. Nonchalamment, elle s’était
dirigée vers le classeur métallique où étaient rangés tous les dossiers, en
faisant rouler ses hanches. Une copine lui avait appris comment marcher sur des
talons hauts avec élégance. Elle appliquait studieusement ses conseils car
Kelly était une experte. D’autre part, il ne fallait pas lancer la jambe trop en
avant si l’on souhaitait éviter toute déchirure, car le fond de la robe était
étroit. C’était donc à petits pas, telle une souris, qu’elle se déplaçait.
– Il faut mettre la main dessus car j’ai
là une lettre importante à y ranger.
M. Trévor Doyle, détective privé, les
cheveux d’un blond presque roux, bien rangés sur le côté, séparés par une
superbe raie rectiligne, la moustache généreuse, tenait la fameuse lettre
devant lui. L’air soucieux, inhabituel chez lui, il la relisait avec attention sous la lumière
de la lampe verte.
Tout respirait calme, sérénité, travail
consciencieux et ténacité dans ce bureau new-yorkais. Les murs blancs, la
moquette verte, les boiseries et le mobilier y contribuaient.
La notoriété de Trévor remplissait encore
et encore le classeur métallique, ce dernier finirait par exploser.
A chaque fois qu’elle manipulait l’un de
ses tiroirs, Paméla, rêveuse, fanatique de comics, imaginait réellement le
classeur en train d’exploser. Les feuilles de vélin virevoltaient puis gisaient
au sol dans un désordre organisé, certaines, frondeuses, passaient même le cap
de la fenêtre ouverte sur la nuit et sur la ville. Une belle scène de bande
dessinée !
La jeune femme regardait maintenant
Trévor. Elle passerait bien le cap elle aussi de son bureau de secrétaire à
celui de détective. La voilà repartie dans son monde virtuel, s’imaginant à la
place de Trévor. Son envie de lire la lettre la démangeait. Or, Trévor
maintenait l’élément de l’enquête à bonne distance. Ce qui attisait d’autant
plus la curiosité de Paméla. Elle était chatouillée.
Ni l’un ni l’autre n’avaient vu le temps
passer, il se faisait tard. Cependant, le jeune détective voulait absolument
retrouver ce dossier avant de partir.
Paméla, présente mais son esprit
ailleurs, se tenait toujours debout devant le classeur.
Trévor n’était même pas distrait par la
présence de la jeune femme à ses côtés. N’importe quel homme aurait aimé cette
robe bleue moulant à merveille les formes généreuses de ce corps de femme
avenant. Les petits talons noirs rehaussaient les mollets et dévoilaient ainsi
le galbe parfait de ses jambes. Ils prolongeaient leur action jusqu’à accentuer
la cambrure de ses reins. Un léger décolleté plongeait discrètement entre ses
seins qu’un soutien-gorge à balconnets mettait en lumière. Ses cheveux relevés
par un brushing parfait dévoilaient la sensualité de son cou légèrement
parfumé. Gris étaient ses deux jolis yeux en amande, délicatement ombrés avec
goût. Cerise était sa bouche pulpeuse dessinée avec précision par un rouge à
lèvres de marque. Belle brunette !
N’importe quel homme mais ce n’était pas
Trévor, absorbé par son travail. De plus, étant jeune marié, on pouvait
également penser que sa femme le contentait, qu’il était encore amoureux. Le
gendre idéal !
Paméla aussi était jeune mariée. Si elle
s’habillait ainsi ce n’était pas pour aguicher mais plutôt pour suivre la mode
et elle y cédait volontiers, par coquetterie. Son code vestimentaire était
aussi dicté par les héroïnes de ses comics préférés dont les auteurs exagéraient
quelque peu la tendance du moment. Augmenter le nombre de lecteurs, avoir la
plus grande popularité était le credo de nombreux dessinateurs. Paméla
souhaitait ressembler notamment à la voluptueuse Patsy Walker de Ruth Atkinson.
L’enquête était loin d’être bouclée, elle
piétinait. En cette nuit du mois d’août il faisait lourd, pas un brin d’air,
une ambiance étouffante. La chaleur restituée par le bitume et les pierres
s’engouffrait par la fenêtre. Paméla, précautionneuse, avait soulevé store et battant
et entrouvert la porte afin de créer un léger courant d’air rafraîchissant.
Plusieurs questions hétéroclites se
bousculaient à cet instant dans son esprit volatil – Où était donc ce
dossier ? Comment Trévor pouvait se supporter avec une veste ? Qu’allait-elle
préparer à manger en rentrant ? N’était-ce pas Irma la femme de ménage qui
aurait rangé n’importe où ce dossier qui trainait, par manie de l’ordre ?
– La pauvrette étant analphabète, elle
n’aurait pas compris la logique sous-tendue par les lettres affichées sur les
tiroirs.
Deux énigmes restaient à découvrir, l’une
générée par la lettre mystérieuse entre les mains de Trévor, l’autre par
l’absence du dossier de M. Fox dans le classeur de Paméla.
L’estomac de Trévor grognait sa longue
attente et son impatience mais ce dernier ne voulait l’entendre. Il n’y
accordait guère d’attention.
Son naturel entêté lui venait de ses
racines irlandaises. Il en avait gardé la force de la pierre, du vent et des
vagues, la rusticité de sa relation au monde. De la moquette verte à l’herbe et
la mousse des prairies irlandaises, il n’y avait qu’un pas qu’il franchissait
de temps en temps quand son esprit cartésien lâchait prise.
Tous les ans, il retournait aux sources,
seul, c’était un besoin vital et impérieux. Pendant ce temps, sa femme rendait
visite à ses parents, dans l’état du Connecticut, à Bridgeport. Une séparation
consentie de quelques jours seulement, après ils passaient leurs vacances
ensemble en Floride.
Paméla jouissait de l’insouciance de la
jeunesse américaine, décomplexée, sans attaches, tirant partie du développement
intensif des différents modes de transport. Issue d’une famille aisée, ouverte
sur la diversité culturelle, elle était vive et curieuse, imaginative, urbaine.
La belle-fille idéale !
Trévor écoutait souvent les suggestions
de la jeune femme dont la perspicacité avait fait ses preuves. Il lui faisait
naturellement confiance. Le courant passait bien entre ces deux là ! Ils
étaient détective et secrétaire.
Mais ce soir, peu à peu vaincu par la
fatigue, le jeune homme souhaitait maintenant ranger cette lettre car pour
l’instant elle ne faisait en rien avancer ses recherches. Son contenu le
laissait perplexe et ce d’autant qu’elle était compromettante.
C’était une lettre de dénonciation, anonyme
et manuscrite. De par son contenu, elle se retrouvait liée au dossier de M. Fox.
Ce dernier, soupçonnant sa femme d’adultère, avait fait appel aux compétences
reconnues de Trévor pour débusquer le contrevenant, le salop qui osait toucher
à son épouse, traduit dans le langage de
M. Fox. Or dans la lettre anonyme, le nom de son client apparaissait mais
devenait aussi le salop qui osait toucher à sa propre femme, à lui,
détective ! Bien sûr, il n’y croyait pas, enfin... il essayait de s’en
persuader. Tout cela commençait à devenir gênant. Son enquête n’avançait pas
faute de preuves et le doute concernant la fidélité de sa femme s’installait
malgré lui. Si cela venait à se savoir, sa notoriété, ses affaires en
prendraient un coup, assassinées par le déshonneur.
Pendant que Paméla farfouillait
méthodiquement dans les tiroirs afin de faire émerger ce fichu dossier,
farouchement accrochée à l’idée que cela ne pouvait venir que de la femme de
ménage, notre détective réfléchissait et hésitait, puis réfléchissait, puis
hésitait encore une fois. Ses origines rurales et ses convictions religieuses
le rendaient prudent.
C’est donc après une mûre réflexion que Trévor
mit sa secrétaire dans la confidence de la lettre. Elle réfléchit à son tour un
instant et sa remarque d’abord surprenante allait devenir pertinente – Et si
les deux faits étaient liés ! La lettre et la disparition du
dossier ! – Le jeune homme n’y avait pas pensé, l’évidence lui sautait
maintenant aux yeux.
Leur premier réflexe fut de vérifier d’où
avait été postée la missive ; d’un quartier qu’ils connaissaient bien tous
deux pour l’avoir fréquenté régulièrement. Elle venait de SoHo.
Cette écriture qui essayait
maladroitement d’en imiter une autre n’était pas inconnue à Paméla. De par le
métier de Trévor et de par ses fréquentations, elle s’était familiarisée avec
ce genre d’exercice.
Neal, son ancien amoureux, qui était
passé récemment, lui aussi détective,
lui avait déjà montré des productions similaires dans les dossiers de ses
clients. A l’époque, ils en avaient bien ri.
Cette fois-ci, Paméla riait toute seule,
à la grande surprise de Trévor. Etait-elle devenue folle ? Non, elle
savait maintenant qui était à l’origine de tout ça. Un indice subtil,
volontairement laissé par l’accusateur dans le cas où Paméla lirait la lettre –
ce dont il ne doutait pas – n’avait pas manqué d’attirer son attention. Ils
connaissaient tous les deux le responsable. Ce n’était autre que Neal lui même,
leur ami.
Ce dernier, voulant taquiner Trévor et
mettre à l’épreuve sa fidélité envers sa femme, avait tout manigancé. Faux M.
Fox, fausse Mme Fox, fausse accusation, fausse enquête, vrai disparition de
dossier le jour où il avait rendu visite à Paméla prétextant le désir d’un
café, fausse lettre anonyme.
Paméla avait raison, tout était lié.
Trévor se mit à rire à son tour mais après avoir eu confirmation de la
supercherie par Neal lui-même, à l’autre bout du fil. Ce qui chagrina un brin
Paméla, ne lui faisait-il plus confiance ?
Ils allaient pouvoir maintenant détruire
la lettre et rentrer ensemble dans leur appartement. Point d’infidélité car
Trévor et Paméla étaient mari et femme. Seulement au bureau, ils avaient décidé
d’un commun accord de faire comme s’ils étaient simplement patron et employée,
détective et secrétaire, par souci du travail bien fait.
C’était vendredi soir et ce week-end ils
iraient faire un tour dans le Connecticut, voir les parents de Paméla et se
prouver la fidélité de leur amour dans une des forêts bucoliques jouxtant la
ville. Ils seraient alors mari et femme.
La troisième est presque prête, il va falloir attendre que je la tape; et oui, tel un "dinoscriptor" j'écris mes nouvelles à la main. Mon inspiration glisse plus facilement sur le papier d'imprimante.
La quatrième est en gestation.
Avouez-le, je vous ai déjà gâté!
Peut-être une "tendre nouvelle" entre deux!
Alors à bientôt.
La troisième est presque prête, il va falloir attendre que je la tape; et oui, tel un "dinoscriptor" j'écris mes nouvelles à la main. Mon inspiration glisse plus facilement sur le papier d'imprimante.
La quatrième est en gestation.
Avouez-le, je vous ai déjà gâté!
Peut-être une "tendre nouvelle" entre deux!
Alors à bientôt.
2 commentaires:
C'est fourbe ! Mais il manque encore un peu de subtilité dans la fourberie pour arriver au niveau d'Agatha !!
As-tu remzrqué que la position de la fille est la position "fesses-seins" à laquelle faisait allusion Lulu tout à l'heure ???
Ho ! Du policier mignon ! Ça, j'aime bien. ^^
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